La loi Climat et résilience en France, adoptée en juillet 2021, a été présentée par le gouvernement comme la traduction législative des travaux de la Convention citoyenne pour le climat (CCC). Ces 150 citoyennes et citoyens tirés au sort, représentatifs de la population française, ont travaillé d'octobre 2019 à juin 2020 sur les actions nécessaires pour que la France respecte ses engagements dans le cadre des accords de Paris.
Dans le rendu de leur conclusions en juin 2021, au chapitre « Consommation », les conventionnels avaient identifiés plusieurs engagements forts de régulation de la publicité. Ceux-ci incluaient notamment l'interdiction de la publicité pour les produits polluants, en particulier les fameux « SUV » (sport utility vehicle) dans l'attente de construire un indice général solide pour mesurer le caractère polluant des produits, un « carbone score ».
Bien que le président de la République s'était engagé à reprendre « sans filtre » les propositions de la CCC, dans le projet de loi présenté par le gouvernement en décembre 2020, l'interdiction de publicité ne concernait que le secteur des énergies fossiles, autrement dit un secteur qui ne fait quasiment aucune publicité, comme l'a confirmé en février 2021 le Conseil d'État examinant le projet de loi.1
On retrouvait déjà, dans l'exposé des motifs par le gouvernement, l'argumentaire des lobbies de la communication et du secteur automobile, en substance : interdire la publicité du secteur automobile pour les véhicules lourds est inenvisageable en raison de son poids dans le financement des médias, cela aurait des conséquence négative sur le pluralisme et la démocratie. Cet argument, que nous contestons largement (voir ci-dessous) a constitué le principal motif avancé par la majorité au pouvoir, notamment par Aurore Bergé, anciennement cadre au sein du groupe de communication Publicis, devenu députée En Marche en 2017 puis rapporteuse du chapitre Consommation de la loi Climat et résilience.
En réalité, les mesures de lutte contre la publicité pour les produits polluants préconisées par la CCC ont été transformées en un dispositif d'autorégulation : les « contrats climat ». Dès lors, sur le principe, il ne s'agit plus d'interdire mais uniquement de réduire la publicité pour des produits polluants, et sur la pratique, il s'agit de la réduire des produits polluants... identifiés par les entreprises mêmes qui les produisent, et au rythme qu'elles auront décidé. L'absence d'objectifs sérieux, ambitieux et mesurables contenus dans les contrats climat, finalement adoptés dans la loi malgré les nombreux amendements déposés non seulement par divers groupes d'opposition mais aussi par plusieurs députés du bloc majoritaire, a scellé l'échec de la loi climat et résilience sur le plan de la régulation de la publicité.